Chansons diverses

Aspirine en ré majeur

paroles : Sigrid Baffert
musique : Bruno Sabathé
arrangements : Jean-Claude Givone

ôter la chemise d’ennui
des lendemains de troubles fêtes
les moutons sous nos lits
les cailloux les arêtes
qui encombrent nos têtes

nouveaux greniers du vague à l’âme
dans nos parkings dans nos vestiaires
on rêve d’un petit courant d’air

juste avec un collier de gammes
quelques notes en boucles d’oreilles
une mélodie
c’est une bouteille à la mer

une aspirine en ré majeur
pour rendre nos coeurs
conducteurs

gratter un peu le vert de gris
qui mange lent’ment nos girouettes
et comme une pluie de riz
sur les mariées en fête
lancer à l’aveuglette

un vieux refrain en Polygram
ou siffloter un petit air
histoire d’sucrer un peu l’amer

n’hésitez pas, messieurs mesdames
goûtez ce sirop de soleil
une fugue dans le sommeil de l’hiver

une aspirine en ré majeur
pour rendre nos coeurs
conducteurs

d’un coup de balai dans la nuit
au grand bal des sorciers poètes
chasser les chauves-souris
d’une chanson à tue-tête
allez allez, trompette !

apprentis chirurgiens de l’âme
poseurs d’arpèges en somnifères
contre nos temps dans nos artères

mettez en musique nos drames
laissez fondre au fond de mon verre
un cachet rose de nos grands-mères
une cuillère

une aspirine en ré majeur
pour rendre mon coeur
conducteur

in Texte à chanter 98
© Le Cabaret Studio

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L’instant du déclic

paroles : Sigrid Baffert 1997
musique et chant : Florence Baffert
arrangements : Olivier Lataste

L’instant du déclic
où la mèche se rebelle
sur le front s’oblique
en épi de sel

empreinte digitale
d’un moment furtif
unique ou banal
volé sur le vif

visages qu’on recueille
bouquets de nitrates
dans le portefeuille
entre nos mains moites

alors comme un hoquet du temps
dans leur vol arrêté
les souvenirs mats ou brillants
habillent la cheminée

face au monument
pour une courte échelle
une ombre entourant
ses paupières de miel

elle est là experte
le soleil en face
elle est là offerte
à l’œil qui l’embrasse

clin d’œil clandestin
du passant qui n’ose
d’un geste importun
troubler cette pose

ces couples qui s’prennent en photo
devant des choses bizarres
leurs amours piégées sur diapos
au filet de l’histoire

couleur noir et blanc
sourire au grimace
reflet insolent
du miroir sans glace

quand le temps retient
sa respiration
quand le temps, jaloux
retient dans sa nasse
ces cœurs de pigeons
avant qu’ils ne froissent

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image Christophe Merlin

CHANSON POUR LES CLOCHES
paroles : Sigrid Baffert, 2009

A ceux qui vont à cloche-pied
les estropiés
moitié-moitié
les tordus les boiteux

à ceux qui marchent à côté
de leurs pompes et
de leurs idées
les rois de l’entre-deux

à ceux qui vont à cloche-oeil
tantôt bâbord
tantôt tribord
jamais bien au milieu

à ceux assis sur le seuil
de leur histoire
tapis dans l’noir
parce qu’ils ont peur du feu

à ceux qui vont à cloche-tête
ceux dont les doutes
pavent la route
les inquiets les frileux

à ceux dont le cerveau lent
tinte un peu trop
comme un grelot
les fous les oublieux

à ceux qui vont à cloche-vie
qui n’ont plus ni
faim ni envie
ni même un sauve-qui-peut

à ceux qui s’en vont tout seuls
dans le décor
parce que la mort
avait de jolis yeux

à ceux qui vont à cloche-coeur
laissés KO
sur le carreau
mais qui restent fleur bleue

à ceux qui dorment au milieu
d’un lit trop grand
tout en rêvant
d’un canapé pour deux

ACCORD DE PASSAGE
paroles : Sigrid Baffert

tu as mis six cordes à mon arc
de quoi affoler les Trois Parques
du fil à retordre en pâture
une ou deux croches à ma mesure
on joue du bout des doigts

on cherche la résonance
un écho contre le silence
peut-être une harmonie sauvage
un accord de passage

juste un léger pizzicato
les notes frissonnent au bas du do
tout semble si simple et pourtant
difficile d’être à ta portée
sans connaître la clé

on cherche la résonance
un écho contre le silence
peut-être une harmonie sauvage
un accord de passage

s’il faut attendre d’être sûr
cueillir le hasard s’il est mûr
les serments tus sont les plus beaux
un pied de nez à tous les mots
qui ont perdu leur sens

on cherche la résonance
un écho contre le silence
peut-être une harmonie sauvage
un accord de passage

 

image Sigrid Baffert

A TIRE D’ELLE
paroles : Sigrid Baffert

Comme un phalène dans la lumière assassine
je veux bien y laisser une aile
je veux bien m’brûler la cervelle
si ça fait frémir Colombine

à tire d’elle
à tire d’elle

je veux bien rester dans la ligne de mire
braver son chien et son fusil
risquer la mort où l’amnésie
si elle me décoche un sourire

à tire d’elle
à tire d’elle

et surtout qu’elle ne rate pas le cœur
si par hasard le canon dévie
qu’on me garde une balle perdue
pour une ultime anesthésie

 

image Christophe Merlin

LA P’TITE ANNONCE
paroles : Sigrid Baffert

cette fois tu es sûr de toi
ça va marcher tu le crois
comédie de journal
toi, jeune loup banal
elle
pomme égarée du papier recyclé
une p’tite annonce qu’elle avait entourée
en rouge

et si c’était elle ?
et si c’était elle ?
et si…

figée derrière son rimmel
le sourire un peu cruel
pressée d’en finir
elle t’écoute sans rien dire
lasse
rimer tes rêves et tes mille ambitions
combien de mots accrochés à l’ham’çon
faut-il ?

et si c’était elle ?
et si c’était elle ?
et si…

elle s’est levée lentement
a pris son imper, ses gants
partie sans un mot
te laissant l’étourneau
seul
en naufragé des squares et bancs publics
avec ton pauvre bouquet et ton cirque
Meetic

et si c’était elle ?
et si c’était elle ?
et si…

comédie de journal
toi
pomme égarée du papier recyclée
une p’tite annonce que t’avais entourée…

image Sigrid Baffert

PASSER LE MUR DU SON
paroles : Sigrid Baffert, 31 octobre 2004
avec Pink Floyd, The Wall

au pied du mur du immense
du film d’Alan Parker
au milieu de la foule
une vie roulée en boule
comme un poing fermé

déjà le mur immense
brisé en deux morceaux
trois naufragés à bord
mur devenu radeau
d’un amour au point mort

pendue au mur immense
en guise de conclusion
et sans crier secours
une longue vibration
un point de non retour

le long du mur immense
des Lamentations
une Mer Morte reflue
cyanure sur l’horizon
point d’interrogation

contre le mur immense
et le vide et l’absence
comme une architecture
des années de silence
jusqu’au point de rupture

là sur le mur immense
colmater les fissures
d’un trop grand mystère
des mots comme une armure
comme un point de repère

et puis ce mur immense
qui s’ouvre tel un fruit mûr
dans un cri de tambour
pour laisser le futur
passer le point du jour

derrière ce mur immense
des pierres à découvrir
des bribes d’écriture
fragments d’un autre mur ?
non : d’un pont. A construire.

image Frederik Peeters

QUAND LES TARTINES TOMBENT COTE BEURRE
paroles : Sigrid Baffert 1996

Ici c’est entre chien et loup
que les visages se détendent
que les mains se délient, gourmandes
caresses pour oublier les coups

c’est sûr qu’on est moins à l’étroit
dans notr’ deux pièces vue sur les toits
depuis qu’le mobilier farceur
est allé s’ennuyer ailleurs

quand les tartines tombent côté beurre
que les huissiers déménageurs
au printemps comme les hirondelles
reviennent emporter la vaisselle

côté salon c’est Waterloo
même le chat nous tourne le dos
pas l’habitude de tant d’espace
sa voix résonne et ça l’agace

dans la cuisine un peu trop nue
le papier peint a l’air défait
qu’on voit ses taches de graisse fondue
que le frigo dissimulait

quand y’a plus d’beurre sur nos tartines
on le dessine on l’imagine
un peu d’Astra de margarine
un peu d’pommade où ça chagrine

c’est pas parce que les meubles s’exilent
qu’on file nos nuits au lexomil
on pique-nique sur la moquette
en riant de la bonne franquette

sur la télé une peu surprise
assis en tailleur t’improvises
encore deux trois dièses ou bémols
avant que le piano s’envole

quand les tartines tombent côté beurre
que les huissiers déménageurs
au printemps comme les hirondelles

LE BLUES DU VIEUX DOUDOU
paroles : Sigrid Baffert 2006

Tout en tétant ton pouce
l’index sur le nez
comme une chanson douce
tu me tiens enlacé

j’ai des taches plein ma veste
mon oeil droit est un trou
tu me traînes partout
par l’oreille qui me reste

C’est le blues du vieux doudou
C’est le blues du vieux doudou

je n’ai plus de couleurs
mais on a beau m’laver
je garde en moi l’odeur
de tes chagrins passés

je chasse tes cauch’mars
je lis dans tes pensées
qui croirait aux pouvoirs
d’un vieux chiffon mouillé ?

C’est le blues du vieux doudou
C’est le blues du vieux doudou

tu m’as perdu mille fois
mille fois on s’est r’trouvés
je n’ai d’prix que pour toi
et pourtant sans regrets

un jour tu m’oublieras
dans un coffre en osier
en laissant dans mes bras
ton enfance au grenier

C’est le blues du vieux doudou
C’est le blues du vieux doudou